Développer un réseau de franchise aux Etats-Unis

DÉVELOPPER UN RÉSEAU DE FRANCHISE AUX ETATS-UNIS

La franchise s’est très largement développée aux Etats-Unis depuis les années 30. Le secteur de l’automobile fut le premier concerné, mais le succès de ce système est tel qu’il s’étend désormais à la restauration, à l’immobilier, au commerce de détail, aux services à la personne et aux entreprises etc.

En 2014, la franchise a connu une forte croissance, offrant d’importantes perspectives d’emploi (+1.8%) et participant de manière significative à l’augmentation du PIB du pays (+2.4%). 2015 s’avère être une année tout aussi prometteuse. L’Association Internationale de la Franchise (IFA) a en effet annoncé une augmentation de 1.6% du nombre d’établissements franchisés (781.794) par rapport à l’année précédente (769.683), générant ainsi une croissance de 5.1% du PIB dans ce secteur[1].

Des grandes Enseignes françaises ont su entamer une conquête du marché américain (ex. Le Duff, l’Occitane, Dessange) et il est certain que d’autres suivront très prochainement le même chemin. Toutefois, il est important pour ces entreprises de bien se préparer et de prendre en compte le système juridique américain qui se caractérise par un système fédéral (I), prévoyant d’importantes obligations d’information precontractuelle (II) et qui encadre la franchise de certaines règles variant d’Etats en Etats (III)

I. Encadrement de la franchise au niveau fédéral et local

Depuis le 21 octobre 1979, l’autorité de la concurrence américaine (« Federal Trade Commission » ou « FTC ») règlemente les conditions sous lesquelles une entreprise peut franchiser son concept, sur l’ensemble du territoire national. Suite à la réforme de 2007 de la « FTC Rule » (ou « Franchise Rule »), un nouveaux texte, en vigueur depuis le 1er juillet 2008, est applicable aux entreprises qui souhaitent développer un réseau de franchise.

A l’instar de la loi Doubin, la FTC Rule met à la charge du Franchiseur la divulgation d’un document d’information précontractuelle (« Franchise Disclosure Document » ou « FDD ») au candidat franchisé[2], afin que ce dernier puisse prendre connaissance des éléments essentiels de l’opération de franchise (expérience du franchiseur, obligations contractuelles, investissement etc.).[3]

Par ailleurs, certains Etats viennent également définir les informations qui doivent être transmises au candidat franchisé avant la signature d’un éventuel contrat et/ou encadrer les relations contractuelles franchiseur/franchisé qui découleraient dudit contrat. Entre autres, dans 14 Etats il est indispensable de procéder à l’enregistrement du FDD au sein d’une agence locale. De surcroît, 19 états réglementent les relations commerciales franchiseurs/franchisés et notamment les conditions de résolution ou de renouvellement du contrat (voir point III.).

Au niveau fédéral, la FTC Rule s’applique dès lors que la relation commerciale répond à la définition de « franchise » établie par la FTC et, par conséquent, que l’on retrouve les trois critères suivants : (1) la transmission par le franchiseur d’une marque ou de tout autre symbole commercial ; (2) un contrôle significatif ou une assistance significative du franchisé à la gestion de l’entreprise ; (3) le règlement d’une somme d’un montant minimum de $500, remise par le franchisé au franchiseur.

Indépendamment de la dénomination que les parties donneraient à leur relation commerciale, dès lors que les critères susmentionnés sont remplis, le franchiseur devra se soumettre à la loi fédérale, à l’exception des opérations faisant l’objet d’une exemption[4].

II. Obligations précontractuelles du Franchiseur au niveau Fédéral

La préparation ainsi que la communication du FDD sont à la charge du franchiseur qui se définit comme « toute personne [individu, groupe, association, collaboration, société ou tout autre entité] qui accorde une franchise et participe à la relation commerciale qui en découle ». Le FDD doit être transmit à chacun des candidats franchisés, ce qui inclut « toute personne [agent, représentant ou employé] qui approche ou est approché par un franchiseur pour discuter d’une éventuelle relation franchiseur/franchisé.

Depuis 2008, la FTC Rule permet expressément au franchiseur de divulguer le FDD par tout moyen, incluant ainsi la voie électronique. Le FDD, bien que devant être rédigé par écrit, s’entend désormais comme tout document papier ou support sous forme tangible susceptible d’être lu (ex. type-set, word processed, documents transmis sous forme électronique : disque dur, CD-ROM, email ou pages Web). Un franchiseur qui choisit de communiquer le FDD par voie électronique doit respecter les conditions spécifiques énoncées par la FTC (ex. pas de vidéo ou de piste audio).

De nos jours, la transmission électronique d’un document peut s’effectuer de diverses manières. Il est important de pouvoir établir que (1) le candidat franchisé a donné son accord concernant le choix du mode de communication du FDD ; (2) le candidat franchisé a connaissance du fait qu’il peut exiger du franchiseur un document écrit ; (3) le FDD forme un seul et même document ; (4) le candidat franchisé a reçu toutes les instructions nécessaires au téléchargement et à la lecture du FDD ; et (5) il est possible d’identifier à quelle version du FDD le franchisé a eu accès et quand il y a eu accès.

La FTC Rule prévoit que le FDD, qui doit contenir 23 categories d’information, doit etre ommuniqué au candidat franchisé 14 jours (nb. dans 5 Etats [Michigan, New-York, Oregon, Rhode Island et Wisconsin] le FDD le minimum requis est de seulement 10 jours) préalablement à la signature du contrat de franchise ou au versement d’une somme d’argent au franchiseur ou à tout autre affilié lié à l’opération de franchise. Les 14 jours sont décomptés à partir de la remise du FDD. Ce n’est qu’au quinzième jour que pourra être signé le contrat ou remise une somme d’argent au franchiseur. Ainsi, le candidat franchisé bénéficie d’un total de 14 jours pour examiner et évaluer le FDD.

Ce dernier a également la possibilité de demander que le document d’information précontractuelle lui soit transmis avant la période minimale requise sans que le franchiseur ne puisse lui imposer aucun règlement. Par ailleurs, toute dépense effectuée volontairement par le candidat en relation avec l’opération de franchise (ex. étude de marché, conseils d’un avocat etc.) sont à sa charge.

7 jours supplémentaires sont accordés au candidat franchisé dès lors que le franchiseur a unilatéralement et substantiellement modifié le FDD qui a été transmis au candidat, afin qu’il puisse réexaminer le nouveau FDD. Cela ne comprend pas les modifications qui consistent à indiquer dans le document le nom, la date, l’adresse du franchisé etc. De même, les modifications effectuées à l’initiative du franchisé ne lui permettent pas de bénéficier de 7 autres jours.

III. Résolution ou renouvellement du contrat de franchise : des restrictions locales

Il n’existe pas de règlementation concernant la relation contractuelle franchiseur/franchisé au niveau fédéral. Cependant, 19 Etats régulent certains aspects de cette relation (Arkansas, Californie, Connecticut, Delaware, Hawaii, Illinois, Indiana, Iowa, New Jersey, Michigan, Minnesota, Mississippi, Missouri, Nebraska, Dakota du nord, Dakota du sud, Virginie, Washington, Wisconsin).

Dans les 19 Etats mentionnés, à l’exclusion du Dakota du nord, il est interdit au franchiseur de mettre un terme au contrat de franchise s’il ne peut justifier d’un “juste motif” (“good cause”). L’insolvabilité, la faillite, l’abandon, le délit lié à l’opération de franchise ou encore l’inexécution des obligations substantielles du franchisé découlant du contrat de franchise sont considérés comme étant un « juste motif ». Le franchiseur peut alors notifier par écrit au franchisé la résolution anticipée du contrat, qui prendra effet après 30 à 120 jours selon les Etats.

Les Etats n’imposent pas d’inclure une clause de renouvellement dans le contrat de franchise. Néanmoins, dès lors qu’une telle clause a été prévue, 12 des Etats susmentionnés (Arkansas, Connecticut, Delaware, Hawaï, Iowa, Indiana, Minnesota, Mississippi, Missouri, Nebraska, New Jersey et Wisconsin) restreignent la faculté pour le franchiseur de ne pas procéder à son renouvellement. La plupart de ces Etats considère que, tout comme il est requis pour mettre fin au contrat de franchise avant son terme, il est nécessaire que le franchiseur prouve un « juste motif » s’il ne souhaite pas le renouveler.

Par ailleurs, en Californie, Illinois, Michigan et Washington, le franchiseur doit notifier au franchisé le non-renouvellement du contrat de franchise et ce, généralement, 6 mois avant la fin du contrat. D’autres obligations ou restrictions sont également imposées (ex. obligation de non concurrence…).

 

Avril 2015

Gilles Menguy

Avocat & Solicitor, GM Avocats

gmenguy@gm-avocats.com

 

[1] Franchise Business Economic Outlook for 2015, IFA, janvier 2015.

[2] Federal Trade Commission : http://www.ftc.gov/

[3] La rédaction du FDD est strictement encadrée par la loi fédérale (FTC Rule 24-119) ; article 16 part 436 du C.F.R.

[4] Franchise Rule, 2008, p7-16.