L’indépendance du franchisé, commerçant indépendant

L’INDEPENDANCE DU FRANCHISE, COMMERÇANT INDEPENDANT

 

L’un des paradoxes de la franchise repose sur le fait que le franchisé est un commerçant indépendant dont la réussite commerciale dépend du potentiel de rentabilité du savoir-faire du franchiseur.

Dès lors, bien qu’indépendant, il doit se placer dans le sillage du franchiseur et donc suivre les normes mises au point par ce dernier. Le fait d’intégrer un réseau lui fait naturellement perdre une part de son indépendance.

Le principe d’indépendance en dépit des restrictions à la liberté du franchisé

L’article A441-1 du Code de commerce prévoit que : « Toute personne vendant des produits ou fournissant des services, liée par un accord de franchise à un franchiseur, informe le consommateur de sa qualité d’entreprise indépendante, de manière lisible et visible, sur l’ensemble des documents d’information, notamment de nature publicitaire, ainsi qu’à l’intérieur et à l’extérieur du lieu de vente » . Le franchisé doit donc apparaître en  sa qualité de commerçant indépendant aux yeux des clients.

La loi rappelle ainsi le principe d’indépendance du franchisé, bien que ce dernier connaisse des tempéraments. En effet, le franchisé et le franchiseur sont indépendants l’un de l’autre mais ont l’obligation de collaborer activement. Le franchisé doit ainsi se former au savoir-faire du franchiseur tandis que ce dernier doit apporter une assistance commerciale et technique à ses franchisés tout au long du contrat. Le franchiseur apporte des conseils tout au long du contrat quant au choix du local par exemple, en matière de publicité, d’agencement des produits…

Une clause prévoyant un approvisionnement exclusif auprès du franchiseur ou d’un fournisseur qu’il aurait désigné ou encore une clause de non concurrence bien que limitée dans le temps et dans l’espace sont autant d’éléments qui peuvent restreindre la liberté de gestion du franchisé.

Le franchisé n’est donc pas totalement libre dans la gestion de son activité, bien qu’il soit  un commerçant indépendant.

Les conséquences de l’indépendance du franchisé

Les aspects positifs

Le franchisé est donc inscrit au Registre du commerce et des sociétés en qualité de commerçant indépendant. Ainsi, le franchisé fidélise sa propre clientèle (du moins la clientèle locale) qui fait alors partie de son fonds de commerce.

Son statut de commerçant et la propriété d’un fonds de commerce qu’il aura crée ou acquis librement lui permet de bénéficier du statut protecteur des baux commerciaux (notamment du droit au renouvellement et de l’indemnité d’éviction).

En sa qualité d’employeur, il va lui-même recruter ses salariés et les encadrer comme il l’entend.

Le franchisé est également libre dans la fixation des prix de revente, bien que la pratique des prix conseillés soit répandue.

Les aspects négatifs

Le franchisé agit en son nom propre et est engagé pour tous les actes qu’il accomplit à l’égard des tiers : salariés, clients, administration fiscale, URSSAF…

Il supporte ainsi tous les risques liés à l’exercice de l’activité.

Le franchiseur ne peut donc pas être engagé pour les actes commis par le franchisé : il n’y a ainsi aucune solidarité entre eux.

Les restrictions à l’indépendance du franchisé

Le contrat de franchise est basé sur la réitération d’un savoir faire : le savoir-faire du franchiseur. Il est donc normal que le franchiseur encadre la mise en oeuvre du savoir-faire et que le franchisé se plie à ses méthodes techniques et commerciales.

Toutefois, cet encadrement ne doit pas s’assimiler à une subordination du franchisé à l’égard du franchiseur. C’est pourquoi, une participation au capital de la société franchisé par le franchiseur par exemple, ou un recrutement des salariés opéré par ce dernier pourraient être analysé comme des indices de subordination par un juge.

Ainsi, si l’assistance est une obligation du franchiseur, il ne doit pas pour autant s’immiscer dans la liberté de gestion dont dispose le franchisé. Il est légitime qu’il contrôle la bonne application de ses normes par le franchisé afin d’assurer l’homogénéité du réseau. Dès lors, bien que le franchisé soit indépendant, le franchiseur est en droit de contrôler la mise en oeuvre des consignes et normes par le biais de visites de contrôle, d’envoi de clients mystère…

Les conséquences d’une remise en cause trop importante de l’indépendance du franchisé sont nombreuses :

  • En cas de mise en évidence d’un lien de subordination entre le franchiseur et le franchisé, les juges pourront requalifier le contrat en contrat de travail. Une résiliation du contrat par exemple pourra alors être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse avec des conséquences financières très lourdes (indemnité de licenciement, de préavis, de congés payés, rappels de salaires…)
  • Remise en cause de la propriété de la clientèle donc du fonds de commerce et partant de l’application du régime du bail commercial
  • Requalification possible du franchiseur en «dirigeant de droit» en cas de procédure collective ou en matière pénale
  • Application de l’article L7321-2 du Code du travail applicable aux gérants de succursale lorsque ces 4 conditions sont remplies alors même qu’un lien de subordination n’a pas besoin d’être démontré :
    • Engagement d’approvisionnement exclusif ou quasi exclusif
    • Local fourni ou agréé par le franchiseur
    • Conditions d’exploitation imposées par le franchiseur
    • Prix de commercialisation imposés par le franchiseur

 

 

Décembre 2012

Gilles Menguy

Avocat & Solicitor, GM Avocats

gmenguy@gm-avocats.com

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